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" La saga du vieil escalier, " un très très long poème de ... Pierre
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Avertissement :
C’est un très long poème que je vous livre-là. Un très long … une saga de 90 strophes !
Certains vont crier à la catastrophe ! D’autres aimerons, ça va de soit !
Je vais donc le publier en 5 fois, ce qui fera 18 strophes par publication.
Voici donc le début de « La saga du vieil escalier, ».
Pierre
Préambule :
Tout ce qui suit ne relève pas de la vérité pure mais pas non plus d’une affabulation débridée. Il est même fort probable que mon récit poétique côtoie la réalité très souvent… j’en suis intimement persuadé et j’ai fait en sorte qu’il en soit ainsi.
A vous d’apprécier ou pas, mais de toute façon : « Le poète à toujours raison »* … quand il écrit.
Pierre Dupuis
* Louis Aragon repris en chanson par Jean Ferrat
Je me dois de vous situer le lieu où se trouve ce vieil escalier et où j'ai écrit cette saga. C'est un gîte que nous avons loué pour les vacances et qui se situe à l’extrême sud de la Vienne et en bordure de la Charente et de la Haute-Vienne sur la commune de Pressac.
La saga du vieil escalier,
Quand je l’ai vu j’ai su de suite
que nous allions sympathiser,
je crois que lui tout aussi vite
était prêt à fraterniser.
Ma main a caressé sa rampe,
je crois bien qu’il a frissonné
… ne riez pas ou je décampe
en vous faisant un pied de nez !
Je sais parler aux vieilles choses
et elles me le rendent bien,
nous sommes très vite en osmose
… « c’est un vieux fou ! » disent certains !
Peut-être bien et je l’assume,
j’ai pitié des gens trop sérieux
qui cultivent leur amertume
sous des prétextes fallacieux !
Vous vous perdez en conjectures
ne sachant sur quel pied danser,
continuez votre lecture
et après vous me jugerez.
Vieilles bâtisses, vieilles pierres,
moulins à eau, moulins à vent,
vieilles poutres, vieilles meulières,
vieil escalier toujours vaillant.
Nous savons très bien nous comprendre,
c’est une question de feeling,
il suffit de savoir attendre :
hors de question de tout timing !
J’ai choisi la troisième marche
le jour du quatrième soir
et j’ai opté comme démarche
de simplement venir m’asseoir.
Il m’a accueilli sans manière
en me disant : « Ah ! Te voilà !
je t’attendais la nuit dernière
mais ne t’inquiète surtout pas !
Je sais juguler l’impatience,
j’ai eu le temps de la dompter,
je te le dis, fais-moi confiance :
elle n’ose plus m’affronter !
Dès notre première rencontre
j’ai su que nous allions parler,
pas de course contre la montre,
prenons le temps de bavarder.
J’ai senti en toi le poète
dès que tu as touché mon bois
et j’ai bien vu rien qu’à ta tête
que tu t’intéressais à moi.
Jusqu’ici le seul personnage
qui m’a écouté jusqu’au bout,
qui a su rester calme et sage
c’était mon ami le hibou.
Dans la vieille bâtisse en ruine
il était venu s’abriter
un jour de grand vent et de bruine
et vingt ans il y est resté !
C’était un ami sympathique,
il écoutait tranquillement
de façon très diplomatique
mes récits tout en s’endormant !
Toi tu n’es là que de passage,
tu resteras bien moins longtemps,
tu es peut-être aussi un sage
mais les hommes ont moins le temps !
Je vais te conter mon histoire,
les grandes lignes seulement,
même si j’ai bonne mémoire
… j’en oublierais certainement !
Je suis bien loin de ma jeunesse :
j’ai environ deux cent vingt ans !
En ces temps-là clergé, noblesse,
régnaient sur les près et les champs.
Dans le fin fond de nos campagnes
c’était toujours la soumission,
l’injustice qui l’accompagne :
le terreau des révolutions.
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Seconde partie :
Un homme, un seul régnait en maître
sur souvent des milliers d’arpents,
lui-même devait se soumettre
au châtelain : chacun son rang !
Réputé pour être sévère,
c’était un très gros régisseur
devant lui mieux valait se taire
que de jouer les rouspéteurs !
C’était le temps du métayage
et il avait des métayers,
ce n’était pas de l’esclavage
mais pas non plus la liberté !
Années bonnes ou bien mauvaises
il fallait payer sans broncher
à l’homme vivant très à l’aise
le fermage ou bien le quitter !
Afin d’asseoir sa réussite,
afin d’épater les voisins
qui venaient lui rendre visite
il fallait maison et jardin.
Il fit bâtir cette demeure,
très luxueuse en ces temps-là,
voulant l’élégance intérieure
à la mesure et me voilà.
Après les murs et la charpente,
la bâtisse reçut son toit,
puis vint l’activité suivante :
les planchers et puis ce fut moi !
Rez-de-chaussée et deux étages,
voila ce qu’il fallait relier,
un travail de compagnonnage
pour charpentiers et menuisiers.
En plus de la fonction pratique,
il fallait que je fusse beau,
un point d’honneur sur l’esthétique :
ils relevèrent le flambeau !
Quartier tournant double volée
pour relier chacun des niveaux,
difficultés très relevées
pour les bras et pour les cerveaux.
Je vais t’expliquer ma naissance
en essayant de faire court
tout en sachant que par essence
je penche pour les longs discours !
Une fois les mesures prises
on me dessina sur papier,
des retouches et des reprises
et je fus bon pour le chantier.
Un travail bien sûr à l’ancienne
réalisé tout à la main
où tous les gens qui interviennent
connaissent leur travail et bien !
Pour évaluer le cubage
du bois pour ma fabrication,
on traça avec précision
mon épure sur un dallage.
Comme essence on choisit le chêne,
pas question d’en être autrement !
Solide et beau, de belles veines :
le meilleur bois assurément.
Cinq ou six années de séchage
en fonction de leur épaisseur,
les sections rendaient au passage
leur tanin et d’autres couleurs.
On avait abattu ces chênes
à la hache et après les troncs
avaient été sciés avec peine
avec de grandes scies en long.
Pour commencer ma mise en œuvre
on attaqua par les limons,
d’autres compagnons à pied d’œuvre
taillaient mes marches à façon.
Et le ballet des herminettes,
des varlopes et des rabots
commença de façon concrète :
en tous sens volaient les copeaux !
XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
Troisième partie :
Et naissaient tenons et mortaises
sous les outils aux fils tranchants,
coupes droites ou coupes biaises
sur les faces ou sur les chants.
Il régnait une bonne ambiance
dans l’équipe et sur le chantier,
ils travaillaient tous en confiance
entre tous les corps de métiers.
Quand survenait une engueulade
- Il faut bien se lâcher un peu ! -
s’en suivait une rigolade
beaucoup plus d’une fois sur deux !
Les journées coupées par des pauses,
essentiellement pour manger,
duraient douze heures - Ah ! Quelle dose ! -
six jours sur sept sans déroger !
L’assemblage puis le montage
prirent du temps et de la sueur,
étayage à tous les étages
avant d’atteindre la hauteur.
Plus besoin de grandes échelles
pour relier les trois niveaux,
une sécurité nouvelle
appréciée de tous aussitôt !
Il ne restait plus que ma rampe
à concevoir et fabriquer,
un travail à donner des crampes
aux cerveaux les plus affûtés !
Peu d’ouvriers étaient capables
de vaincre la difficulté
pour certains incommensurable :
une question de facultés !
Il fallut tout le savoir-faire
d’un des plus anciens compagnons
qui passait ses journées entières
entre la règle et le crayon.
Il traçait et marquait les pièces
et les autres les façonnaient
sous son contrôle et en souplesse :
tous les hommes le respectaient.
Après mon ultime cheville
ce fut les hourras du chantier,
la fierté dans les yeux qui brillent
au travers des regards altiers.
Les hommes à qui je dois la vie,
après un dernier long regard
me firent avec sympathie
des gestes d’adieu : bel égard !
Et l’on pendit la crémaillère
un jour de juin, il faisait beau,
tous les invités défilèrent
devant moi en lançant des « Oh ! »
J’étais le clou de la soirée,
tout le monde voulait me voir,
une femme, une mijaurée,
m’élut pour se faire valoir !
Félicitations ou léchages
selon le rang des invités,
selon l’humeur, selon les âges,
furent grandement délivrés.
Ce fut le début de ma vie,
l’aube d’une longue saga,
mais je vois que tu as envie
que je te raconte cela !
Je vais en faire une synthèse
pour ne pas y passer la nuit,
je pourrais en faire une thèse
mais je m’en tiendrais à minuit .
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Quatrième partie
J’ai vu défiler des familles,
des couples et beaucoup d’enfants,
des joies mais aussi des bisbilles
et parfois des déchirements.
Des mariages et des baptêmes
mais aussi des enterrements,
des accords et des anathèmes
et des complots peu reluisants !
Des jours de fête ou de kermesse,
des fins de travaux dans les champs,
des amours ou bien de la fesse
selon l’humeur du moment !
La famille vivait à l’aise
grâce au travail des paysans,
les échos de la Marseillaise
ne parvenaient pas jusqu’aux champs.
Une condition féodale,
pas loin des serfs assurément,
une dépendance totale
au bon vouloir des exploitants !
Chapeaux bas et têtes baissées,
c’était le lot de tous les jours,
quelques suppliques accordées
mais sans trompette ni tambour !
Chuchotements et messes basses
parlaient d’une révolution
et de soulèvements de masse
qui s’étendaient à la région.
Les grands seigneurs étaient en fuite,
leurs châteaux pillés voir brûlés,
on savait que viendrait ensuite
le tour des maîtres mal aimés.
Car si certains étaient honnêtes,
d’autres étaient des malfaisants,
on parlait que déjà des têtes
avaient roulé dans quelques champs !
Mais celui qui était en place
était un maître respecté,
juste et il n’y eut pas de chasse
à l’homme pour l’appréhender.
Une concorde fut trouvée
en attendant d’y voir plus clair
et cela dura des années
mais bien fini le temps des serfs !
Tout doucement la république
étendait son drapeau partout,
plus question de vaines suppliques,
rien que le droit et puis c’est tout !
Plus question de baisser la tête
et de grands saluts chapeau bas,
yeux dans les yeux en tête-à-tête :
les métayers prenaient le pas.
Pour la répartition des terres
il fallut attendre longtemps,
dessaisir les propriétaires
demanda énergie et temps.
L’état, le clergé, la noblesse
perdirent prés, forêts et champs,
ce qui provoqua l’allégresse
dans le monde des paysans.
Réduisant le grand morcelage,
les plus forts ou les plus malins,
par achat ou par mariage
unirent les petits lopins.
Ils possédaient enfin leur terre,
le métayage était fini,
ils cessaient d’être tributaires
du bon vouloir et du mépris !
J’ai vu ces changements se faire,
j’ai vu la mécanisation
révolutionner et défaire
de longs siècles de traditions.
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Cinquième et dernière partie :
Et puis dans les années quarante,
au milieu du siècle dernier,
survint une chose inquiétante :
silence du bas au grenier !
Plus personne dans la bâtisse,
volets claquant à tous les vents,
mauvais signe, mauvais auspices,
un état démoralisant.
Soixante-dix années lugubres
à ressasser les souvenirs
dans cette bâtisse insalubre,
m’interrogeant sur l’avenir.
Des journées et des nuits entières
sous la pluie et les courants d’air,
toiture crevée aux faîtières,
carreaux cassés … un goût d’enfer !
Et puis un jour – quelle surprise ! –
on s’activa autour des murs,
il n’y avait plus de méprise :
belle éclaircie pour le futur !
Les corps de métiers envahirent
de nouveau la grande maison,
j’étais … – comment bien le décrire ? –
… à deux doigts de la pâmoison !
Par chance les propriétaires
-
je les en remercie ici ! –
avaient décidé de refaire
à l’ancienne ce beau logis !
On m’a briqué et fait reluire,
j’avais bien résisté au temps
et je continue de séduire
malgré mes bons deux cent vingt ans !
La bâtisse est devenue gîte,
les murs résonnent de nouveau,
ça bouge, ça joue, ça s’agite
et c’est bien cela qui prévaut !
Il arrive qu’on me caresse :
beaucoup de gens aiment le bois
mais qu’on me parle avec tendresse
il y en a peu comme toi !
Voilà tu connais mon histoire,
pour le moins un bon résumé,
quelques signes prémonitoires
me disent que tu as aimé.
En échange je te demande
juste une petite faveur :
de la partager sans prébende,
cela me ferait chaud au cœur ! »
Je lui promis, nous nous quittâmes
… tout du moins du coté esprit,
en montant les marches ses lames
craquaient d’un joyeux petit bruit !
J’ai honoré là ma promesse
– Pas question de me défiler ! –
avec amour, avec tendresse
pour mon vieil ami l’escalier.
Quand viendra ma dernière strophe,
lui sera toujours là vaillant,
ce n’est pas une catastrophe
… les hommes durent moins longtemps.
Quand viendra l’heure de cette heure
peut-être aura-t-il un frisson
qu’il transmettra à la demeure
puisqu’ils vivent à l’unisson !
S’il rencontre un autre poète,
lui aussi amoureux du bois,
il se pourrait bien que peut-être
… il lui glisse deux mots sur moi …
Pierre Dupuis
Fin !
« Rébus : réponse au petit rébus dominical de ... Rotpier ! " La saga du vieil escalier, " un très très long poème de ... Pierre ... Seconde partie »
Tags : Poésie, Escalier, Bois, Paysans, Métayer, Révolution, Noblesse, Clergé, " La saga du vieil escalier, " un très très long poème de ... Pierre
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Commentaires
Salut Durdan !
C’est pourtant un beau métier !
Bonnes vacances détendues à Larressore !
Et pis c'est tout !
Bon dimanche !
Rotpier l
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Dimanche 24 Juillet 2016 à 15:43
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Plombier ... je sais faire aussi ! Nous avons bâti entièrement notre maison, mon épouse et moi avec l'aide des enfants pour les petits boulots. Si on enlève le plâtre et les enduits extérieurs, j'ai fait tous les corps de métiers intervenant dans la construction d'une maison ... y compris les plans bien sûr ! J' suis comme ça !
je me suis arrêté une nuit à Roumazières ;l'hôtelier à retapé les parquets ça sent la cire comme au bon vieux temps
Si j'y repasse,je prends des photos
Ton escalier aime donc quand ça s'agîte
Salut Durdan !
Oui, c’est un bon vivant, pas un taciturne !
Comme ça sent bon la cire, sire !
Ça me rappelle quand on astiquait les tables
à l’école avant de partir en vacances… au 14 juillet !
Et pis c'est tout !
Bonne journée !
Rotpier l
J'adore le bois, j'admire le travail des menuisiers, des ébénistes. J'aime entrer dans leurs ateliers, comme çà sent bon ... Je peux les regarder travailler le bois des heures durant.
Cet escalier a su t'inspirer, quel long et beau poème, comme il mérite tes mots.Pour moi certains objets fabriqués par les hommes sont comme des êtres vivants. Dans mon tout petit logis de mamie esseulée, j'ai gardé un vieux petit meuble me suit depuis toujours. Fait main, décoré par un ébéniste. Il m'a connue toute petite, il m'arrive de lui parler.
Voilà un bel escalier qui en a vu de toutes les couleurs, comme ton écriture ! Il est refait à neuf pour vivre encore très longtemps. Merci à ces personnes qui font revivre les anciennes maisons.
Bonne soirée cher Pierre le poète et gros bisous
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Vendredi 29 Juillet 2016 à 09:38
Bonjour Annick !
Merci beaucoup pour les compliments !
J’adore aussi le bois, surtout le chêne !
Tu peux aller faire un petit tour ici si tu le veux :
https://rotpier27.wordpress.com/2015/07/30/le-travail-du-bois-une-de-mes-passions/
Bonne journée !
Pierre
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je penses que ça va être passionnant...si
Salut Durdan !
Cela devrait te plaire je pense !
A demain pour la suite !
Bonne journée !
Rotpier l
http://rotpier.eklablog.com/